Pèlerinage
Où vont les vieux paysans noirs
Par les chemins en or des soirs ?
A grands coups d'ailes affolées,
En leurs toujours folles volées,
Les moulins fous fauchent le vent.
Le cormoran des temps d'automne
jette au ciel triste et monotone
Son cri sombre comme la nuit.
C'est l'heure brusque de la terreur,
Où passe, en son charroi d'horreur,
Le vieux Satan des moissons fausses.
Par la campagne en grand deuil d'or,
Où vont les vieux silencieux
Quelqu'un a dû frapper l'été
De mauvaise fécondité :
Le blé haut ne fut que paille,
Les bonnes eaux n'ont point coulé
Par les veines du champ brûlé ;
Quelqu'un a dû frapper les sources
Quelqu'un a dû sécher la vie,
Comme une gorge inassouvie
Vide d'un trait le fond d'un verre.
Par la campagne en grand deuil d'or,
Où vont les vieux et leur misère ?
L'âpre semeur des mauvais germes,
Au temps de mai baignant les fermes,
Les vieux l'ont tous senti passer.
Ils l'ont surpris morne et railleur,
Penché sur la campagne en fleur;
Plein de foudre, comme l'orage.
Les vieux n'ont rien osé se dire.
Mais tous ont entendu son rire
Courir de taillis en taillis.
Or, ils savent par quel moyen
On peut fléchir Satan païen,
Qui reste maître des moissons.
Par la campagne en grand deuil d'or,
[...] Read more
poem by Emile Verhaeren
Added by Poetry Lover
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