
A Une Madone (To A Madonna)
Ex-voto dans le goût espagnol
Je veux bâtir pour toi, Madone, ma maîtresse,
Un autel souterrain au fond de ma détresse,
Et creuser dans le coin le plus noir de mon coeur,
Loin du désir mondain et du regard moqueur,
Une niche, d'azur et d'or tout émaillée,
Où tu te dresseras, Statue émerveillée.
Avec mes Vers polis, treillis d'un pur métal
Savamment constellé de rimes de cristal
Je ferai pour ta tête une énorme Couronne;
Et dans ma Jalousie, ô mortelle Madone
Je saurai te tailler un Manteau, de façon
Barbare, roide et lourd, et doublé de soupçon,
Qui, comme une guérite, enfermera tes charmes,
Non de Perles brodé, mais de toutes mes Larmes!
Ta Robe, ce sera mon Désir, frémissant,
Onduleux, mon Désir qui monte et qui descend,
Aux pointes se balance, aux vallons se repose,
Et revêt d'un baiser tout ton corps blanc et rose.
Je te ferai de mon Respect de beaux Souliers
De satin, par tes pieds divins humiliés,
Qui, les emprisonnant dans une molle étreinte
Comme un moule fidèle en garderont l'empreinte.
Si je ne puis, malgré tout mon art diligent
Pour Marchepied tailler une Lune d'argent
Je mettrai le Serpent qui me mord les entrailles
Sous tes talons, afin que tu foules et railles
Reine victorieuse et féconde en rachats
Ce monstre tout gonflé de haine et de crachats.
Tu verras mes Pensers, rangés comme les Cierges
Devant l'autel fleuri de la Reine des Vierges
Etoilant de reflets le plafond peint en bleu,
Te regarder toujours avec des yeux de feu;
Et comme tout en moi te chérit et t'admire,
Tout se fera Benjoin, Encens, Oliban, Myrrhe,
Et sans cesse vers toi, sommet blanc et neigeux,
En Vapeurs montera mon Esprit orageux.
Enfin, pour compléter ton rôle de Marie,
Et pour mêler l'amour avec la barbarie,
Volupté noire! des sept Péchés capitaux,
Bourreau plein de remords, je ferai sept Couteaux
Bien affilés, et comme un jongleur insensible,
Prenant le plus profond de ton amour pour cible,
Je les planterai tous dans ton Coeur pantelant,
Dans ton Coeur sanglotant, dans ton Coeur ruisselant!
To a Madonna
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poem by Charles Baudelaire
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Le Mendiant
C'était quand le printemps a reverdi les prés.
La fille de Lycus, vierge aux cheveux dorés,
Sous les monts Achéens, non loin de Cérynée,
Errait à l'ombre, aux bords du faible et pur Crathis,
Car les eaux du Crathis, sous des berceaux de frêne,
Entouraient de Lycus le fertile domaine.
Soudain, Ã l'autre bord,
Du fond d'un bois épais, un noir fantôme sort,
Tout pâle, demi-nu, la barbe hérissée:
Il remuait à peine une lèvre glacée,
Des hommes et des dieux implorait le secours,
Et dans la forêt sombre errait depuis deux jours;
Il se traîne, il n'attend qu'une mort douloureuse;
Il succombe. L'enfant, interdite et peureuse,
A ce hideux aspect sorti du fond des bois,
Veut fuir; mais elle entend sa lamentable voix.
Il tend les bras, il tombe à genoux; il lui crie
Qu'au nom de tous les dieux il la conjure, il prie,
Et qu'il n'est point à craindre, et qu'une ardente faim
L'aiguillonne et le tue, et qu'il expire enfin.
'Si, comme je le crois, belle dès ton enfance,
C'est le dieu de ces eaux qui t'a donné naissance,
Nymphe, souvent les voeux des malheureux humains
Ouvrent des immortels les bienfaisantes mains,
Ou si c'est quelque front porteur d'une couronne
Qui te nomme sa fille et te destine au trône,
Souviens-toi, jeune enfant, que le ciel quelquefois
Venge les opprimés sur la tête des rois.
Belle vierge, sans doute enfant d'une déesse,
Crains de laisser périr l'étranger en détresse:
L'étranger qui supplie est envoyé des dieux.'
Elle reste. A le voir, elle enhardit ses yeux,
. . . . . . . . et d'une voix encore
Tremblante: 'Ami, le ciel écoute qui l'implore.
Mais ce soir, quand la nuit descend sur l'horizon,
Passe le pont mobile, entre dans la maison;
J'aurai soin qu'on te laisse entrer sans méfiance.
Pour la douzième fois célébrant ma naissance,
Mon père doit donner une fête aujourd'hui.
Il m'aime, il n'a que moi: viens t'adresser à lui,
C'est le riche Lycus. Viens ce soir; il est tendre,
Il est humain: il pleure aux pleurs qu'il voit répandre.'
Elle achève ces mots, et, le coeur palpitant,
S'enfuit; car l'étranger sur elle, en l'écoutant,
Fixait de ses yeux creux l'attention avide.
Elle rentre, cherchant dans le palais splendide
L'esclave près de qui toujours ses jeunes ans
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poem by Andre Marie de Chenier
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L’Invention
O fils du Mincius, je te salue, ô toi
Par qui le dieu des arts fut roi du peuple-roi!
Et vous, à qui jadis, pour créer l'harmonie,
L'Attique et l'onde Égée, et la belle Ionie,
Donnèrent un ciel pur, les plaisirs, la beauté,
Des moeurs simples, des lois, la paix, la liberté,
Un langage sonore aux douceurs souveraines,
Le plus beau qui soit né sur des lèvres humaines!
Nul âge ne verra pâlir vos saints lauriers,
Car vos pas inventeurs ouvrirent les sentiers;
Et du temple des arts que la gloire environne
Vos mains ont élevé la première colonne.
A nous tous aujourd'hui, vos faibles nourrissons,
Votre exemple a dicté d'importantes leçons.
Il nous dit que nos mains, pour vous être fidèles,
Y doivent élever des colonnes nouvelles.
L'esclave imitateur naît et s'évanouit;
La nuit vient, le corps reste, et son ombre s'enfuit.
Ce n'est qu'aux inventeurs que la vie est promise.
Nous voyons les enfants de la fière Tamise,
De toute servitude ennemis indomptés;
Mieux qu'eux, par votre exemple, à vous vaincre excités,
Osons; de votre gloire éclatante et durable
Essayons d'épuiser la source inépuisable.
Mais inventer n'est pas, en un brusque abandon,
Blesser la vérité, le bon sens, la raison;
Ce n'est pas entasser, sans dessein et sans forme,
Des membres ennemis en un colosse énorme;
Ce n'est pas, élevant des poissons dans les airs,
A l'aile des vautours ouvrir le sein des mers;
Ce n'est pas sur le front d'une nymphe brillante
Hérisser d'un lion la crinière sanglante:
Délires insensés! fantômes monstrueux!
Et d'un cerveau malsain rêves tumultueux!
Ces transports déréglés, vagabonde manie,
Sont l'accès de la fièvre et non pas du génie;
D'Ormus et d'Ariman ce sont les noirs combats,
Où, partout confondus, la vie et le trépas,
Les ténèbres, le jour, la forme et la matière,
Luttent sans être unis; mais l'esprit de lumière
Fait naître en ce chaos la concorde et le jour:
D'éléments divisés il reconnaît l'amour,
Les rappelle; et partout, en d'heureux intervalles,
Sépare et met en paix les semences rivales.
Ainsi donc, dans les arts, l'inventeur est celui
Qui peint ce que chacun put sentir comme lui;
Qui, fouillant des objets les plus sombres retraites,
Étale et fait briller leurs richesses secrètes;
Qui, par des noeuds certains, imprévus et nouveaux,
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poem by Andre Marie de Chenier
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L'Aveugle
'Dieu dont l'arc est d'argent, dieu de Claros, écoute;
O Sminthée-Apollon, je périrai sans doute,
Si tu ne sers de guide à cet aveugle errant.'
C'est ainsi qu'achevait l'aveugle en soupirant,
Et près des bois marchait, faible, et sur une pierre
S'asseyait. Trois pasteurs, enfants de cette terre,
Le suivaient, accourus aux abois turbulents
Des molosses, gardiens de leurs troupeaux bêlants.
Ils avaient, retenant leur fureur indiscrète,
Protégé du vieillard la faiblesse inquiète;
Ils l'écoutaient de loin, et s'approchant de lui:
Quel est ce vieillard blanc, aveugle et sans appui?
Serait-ce un habitant de l'empire céleste?
Ses traits sont grands et fiers; de sa ceinture agreste
Pend une lyre informe; et les sons de sa voix
Émeuvent l'air et l'onde, et le ciel et les bois.'
Mais il entend leurs pas, prête l'oreille, espère,
Se trouble, et tend déjà les mains à la prière.
'Ne crains point, disent-ils, malheureux étranger,
Si plutôt, sous un corps terrestre et passager,
Tu n'es point quelque dieu protecteur de la Grèce,
Tant une grâce auguste ennoblit ta vieillesse!
Si tu n'es qu'un mortel, vieillard infortuné,
Les humains près de qui les flots t'ont amené
Aux mortels malheureux n'apportent point d'injures.
Les destins n'ont jamais de faveurs qui soient pures.
Ta voix noble et touchante est un bienfait des dieux;
Mais aux clartés du jour ils ont fermé tes yeux.
--Enfants, car votre voix est enfantine et tendre,
Vos discours sont prudents plus qu'on n'eût dû l'attendre;
Mais, toujours soupçonneux, l'indigent étranger
Croit qu'on rit de ses maux et qu'on veut l'outrager.
Ne me comparez point à la troupe immortelle:
Ces rides, ces cheveux, cette nuit éternelle,
Voyez, est-ce le front d'un habitant des cieux?
Je ne suis qu'un mortel, un des plus malheureux!
Si vous en savez un, pauvre, errant, misérable,
C'est à celui-là seul que je suis comparable;
Et pourtant je n'ai point, comme fit Thamyris,
Des chansons à Phoebus voulu ravir le prix;
Ni, livré comme Oedipe à la noire Euménide,
Je n'ai puni sur moi l'inceste parricide;
Mais les dieux tout-puissants gardaient à mon déclin
Les ténèbres, l'exil, l'indigence et la faim.
--Prends, et puisse bientôt changer ta destinée!'
Disent-ils. Et tirant ce que, pour leur journée,
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poem by Andre Marie de Chenier
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Jeton KELMENDI – Biographie poésie
Traduit en français par Athanase Vantchev de Thracy Paris
Jeton KELMENDI – Biographie
Jeton Kelmendi est un auteur qui propose une poésie tri-dimensionnelle, couplant modernité et actualité, et qui la communique d’une manière à la fois originale et traditionnelle. Des critiques littéraires ont apprécié dans sa poésie un message au caractère claire, puissant et accompli.
Le langage de Kelmendi est personnel et s’offre naturellement au lecteur. Sa forme agréable et attractive tient significativement à ses concepts émouvants figuratifs en même temps que complexes. L’essence de sa poésie est une narration verticale et une sélection rigoureuse des sujets abordés, qui lui permettent des jeux d’espace et de temps.
Le poète albanais Jeton Kelmendi est né à Peja en 1978. Il a suivi sa scolarité, primaire et secondaire, dans sa ville natale, puis il a poursuivi des études supérieures à l’Université de Prishtina. Correspondant de plusieurs média albanais (en Albanie et au Kosovo) , il collabore avec encore d’autres au niveau international.
Kelmendi est un nom familier aux lecteurs kosovars de poésie, depuis 2000.
Il est également connu comme journaliste, spécialisé dans les domaines politique et culturel.
La poésie de Kelmendi a été traduite en plusieurs langues et figure dans de nombreuses anthologies. Membre de plusieurs associations internationales de poètes, il a été publié dans des revues culturelles, surtout en anglais.
Au centre de la pensée poétique de Kelmendi se trouvent la subtilité de l’expression et le soin accordé à la parole. Les thèmes dominants de ses écrits sont l’amour et les réalités crues de la situation politique, qu’imprègne souvent un sentiment de déception devant la conduite des affaires.
Il est un ancien combattant de l’UCK (Armée de Libération Kosovare) . Actuellement, membre de l’Association Européenne des Journalistes Professionnels, Kelmendi réside à Bruxelles.
Bibliographie
En albanais:
Le siècle de promesses - Shekulli i Premtimeve,1999 (poésie)
Au delà du silence - Përtej Heshtjes,2002 (poésie)
S’il est midi - Në qoftë mesditë,2004 (poésie)
Donnez-moi une patrie - Më fal pak Atdhe,2005 (poésie)
Où vont les avenirs - Ku shkojnë ardhjet,2007 (poésie)
Madame Parole - Zonja Fjalë 2007 (théâtre)
En roumain:
Si rares sont devenues les lettres - Ce mult s-au rãrit scrisorile 2007 (anthologie personnelle de poèmes)
Poesie
MADEMOISELLE PAROLE ET MONSIEUR PENSEE
1.
J’ai parlé d’une manière plutôt
Différente
Trop triomphante
Mademoiselle
J’espère que
Vous n’y voyez pas d’offense
Ce ne sont, après tout
Que des paroles d’un poète
Et vous savez qu’il est permis
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poem by Jeton Kelmendi Poét
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A qui la faute?
Tu viens d'incendier la Bibliothèque ?
- Oui.
J'ai mis le feu là .
- Mais c'est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C'est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C'est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi
Des générations ténébreuses encore
Qui rendent dans la nuit témoignage à l'aurore.
Quoi! dans ce vénérable amas des vérités,
Dans ces chefs-d'oeuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans les siècles, dans l'homme antique, dans l'histoire,
Dans le passé, leçon qu'épelle l'avenir,
Dans ce qui commença pour ne jamais finir,
Dans les poètes! quoi, dans ce gouffre des bibles,
Dans le divin monceau des Eschyles terribles,
Des Homères, des jobs, debout sur l'horizon,
Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,
Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l'esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C'est le livre ? Le livre est là sur la hauteur;
Il luit; parce qu'il brille et qu'il les illumine,
Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d'esclave et plus de paria.
Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria.
Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille
L'âme immense qu'ils ont en eux, en toi s'éveille ;
Ébloui, tu te sens le même homme qu'eux tous ;
Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils t'enseignent ainsi que l'aube éclaire un cloître
À mesure qu'il plonge en ton coeur plus avant,
Leur chaud rayon t'apaise et te fait plus vivant ;
Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre,
Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car la science en l'homme arrive la première.
Puis vient la liberté. Toute cette lumière,
C'est à toi comprends donc, et c'est toi qui l'éteins !
Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints.
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poem by Victor Hugo
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La Fée Et La Péri (The Fay And The Peri)
I
Enfants ! si vous mouriez, gardez bien qu'un esprit
De la route des cieux ne détourne votre âme !
Voici ce qu'autrefois un vieux sage m'apprit : -
Quelques démons, sauvés de l'éternelle flamme,
Rebelles moins pervers que l'Archange proscrit,
Sur la terre, où le feu, l'onde ou l'air les réclame,
Attendent, exilés, le jour de Jésus-Christ.
Il en est qui, bannis des célestes phalanges,
Ont de si douces voix qu'on les prend pour des anges.
Craignez-les : pour mille ans exclus du paradis,
Ils vous entraîneraient, enfants, au purgatoire ! -
Ne me demandez pas d'où me vient cette histoire;
Nos pères l'ont contée; et moi, je la redis.
II
LA PÉRI
Où vas-tu donc, jeune âme?... Écoute !
Mon palais pour toi veut s'ouvrir.
Suis-moi, des cieux quitte la route;
Hélas ! tu t'y perdrais sans doute,
Nouveau-né, qui viens de mourir !
Tu pourras jouer à toute heure
Dans mes beaux jardins aux fruits d'or;
Et de ma riante demeure
Tu verras ta mère qui pleure
Près de ton berceau, tiède encor.
Des Péris je suis la plus belle;
Mes sueurs règnent où naît le jour;
Je brille en leur troupe immortelle,
Comme entre les fleurs brille celle
Que l'on cueille en rêvant d'amour.
Mon front porte un turban de soie;
Mes bras de rubis sont couverts;
Quand mon vol ardent se déploie,
L'aile de pourpre qui tournoie
Roule trois yeux de flamme ouverts.
Plus blanc qu'une lointaine voile,
Mon corps n'en a point la pâleur;
En quelque lieu qu'il se dévoile,
Il l'éclaire comme une étoile,
Il l'embaume comme une fleur.
LA FÉE
Viens, bel enfant ! Je suis la Fée.
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poem by Victor Hugo
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A Le Brun Et Au Marquis De Brazais
Le Brun, qui nous attends aux rives de la Seine,
Quand un destin jaloux loin de toi nous enchaîne;
Toi, Brazais, comme moi sur ces bords appelé,
Sans qui de l'univers je vivrais exilé;
Depuis que de Pandore un regard téméraire
Versa sur les humains un trésor de misère,
Pensez-vous que du ciel l'indulgente pitié
Leur ait fait un présent plus beau que l'amitié?
Ah! si quelque mortel est né pour la connaître.
C'est nous, âmes de feu, dont l'Amour est le maître.
Le cruel trop souvent empoisonne ses coups;
Elle garde à nos coeurs ses baumes les plus doux.
Malheur au jeune enfant seul, sans ami, sans guide,
Qui près de la beauté rougit et s'intimide,
Et, d'un pouvoir nouveau lentement dominé,
Par l'appât du plaisir doucement entraîné,
Crédule, et sur la foi d'un sourire volage,
A cette mer trompeuse et se livre et s'engage!
Combien de fois, tremblant et les larmes aux yeux,
Ses cris accuseront l'inconstance des dieux!
Combien il frémira d'entendre sur sa tête
Gronder les aquilons et la noire tempête,
Et d'écueils en écueils portera ses douleurs
Sans trouver une main pour essuyer ses pleurs!
Mais heureux dont le zèle, au milieu du naufrage,
Viendra le recueillir, le pousser au rivage;
Endormir dans ses flancs le poison ennemi;
Réchauffer dans son sein le sein de son ami,
Et de son fol amour étouffer la semence,
Ou du moins dans son coeur ranimer l'espérance!
Qu'il est beau de savoir, digne d'un tel lien,
Au repos d'un ami sacrifier le sien!
Plaindre de s'immoler l'occasion ravie,
Être heureux de sa joie et vivre de sa vie!
Si le ciel a daigné d'un regard amoureux
Accueillir ma prière et sourire à mes voeux,
Je ne demande point que mes sillons avides
Boivent l'or du Pactole et ses trésors liquides;
Ni que le diamant, sur la pourpre enchaîné,
Pare mon coeur esclave au Louvre prosterné;
Ni même, voeu plus doux! que la main d'Uranie
Embellisse mon front des palmes du génie;
Mais que beaucoup d'amis, accueillis dans mes bras,
Se partagent ma vie et pleurent mon trépas;
Que ces doctes héros, dont la main de la Gloire
A consacré les noms au temple de Mémoire,
Plutôt que leurs talents, inspirent à mon coeur
Les aimables vertus qui firent leur bonheur;
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poem by Andre Marie de Chenier
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A des oiseaux envolés
Enfants ! - Oh ! revenez ! Tout à l'heure, imprudent,
Je vous ai de ma chambre exilés en grondant,
Rauque et tout hérissé de paroles moroses.
Et qu'aviez-vous donc fait, bandits aux lèvres roses ?
Quel crime ? quel exploit ? quel forfait insensé ?
Quel vase du Japon en mille éclats brisé ?
Quel vieux portrait crevé ? Quel beau missel gothique
Enrichi par vos mains d'un dessin fantastique ?
Non, rien de tout cela. Vous aviez seulement,
Ce matin, restés seuls dans ma chambre un moment,
Pris, parmi ces papiers que mon esprit colore,
Quelques vers, groupe informe, embryons près d'éclore,
Puis vous les aviez mis, prompts à vous accorder,
Dans le feu, pour jouer, pour voir, pour regarder
Dans une cendre noire errer des étincelles,
Comme brillent sur l'eau de nocturnes nacelles,
Ou comme, de fenêtre en fenêtre, on peut voir
Des lumières courir dans les maisons le soir.
Voilà tout. Vous jouiez et vous croyiez bien faire.
Belle perte, en effet ! beau sujet de colère !
Une strophe, mal née au doux bruit de vos jeux,
Qui remuait les mots d'un vol trop orageux !
Une ode qui chargeait d'une rime gonflée
Sa stance paresseuse en marchant essoufflée !
De lourds alexandrins l'un sur l'autre enjambant
Comme des écoliers qui sortent de leur banc !
Un autre eût dit : - Merci ! Vous ôtez une proie
Au feuilleton méchant qui bondissait de joie
Et d'avance poussait des rires infernaux
Dans l'antre qu'il se creuse au bas des grands journaux. -
Moi, je vous ai grondés. Tort grave et ridicule !
Nains charmants que n'eût pas voulu fâcher Hercule,
Moi, je vous ai fait peur. J'ai, rêveur triste et dur,
Reculé brusquement ma chaise jusqu'au mur,
Et, vous jetant ces noms dont l'envieux vous nomme,
J'ai dit : - Allez-vous-en ! laissez-moi seul ! - Pauvre homme !
Seul ! le beau résultat ! le beau triomphe ! seul !
Comme on oublie un mort roulé dans son linceul,
Vous m'avez laissé là , l'oeil fixé sur ma porte,
Hautain, grave et puni. - Mais vous, que vous importe !
Vous avez retrouvé dehors la liberté,
Le grand air, le beau parc, le gazon souhaité,
L'eau courante où l'on jette une herbe à l'aventure,
Le ciel bleu, le printemps, la sereine nature,
Ce livre des oiseaux et des bohémiens,
Ce poème de Dieu qui vaut mieux que les miens,
Où l'enfant peut cueillir la fleur, strophe vivante,
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poem by Victor Hugo
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A propos d'Horace
Marchands de grec ! marchands de latin ! cuistres ! dogues!
Philistins ! magisters ! je vous hais, pédagogues !
Car, dans votre aplomb grave, infaillible, hébété,
Vous niez l'idéal, la grâce et la beauté !
Car vos textes, vos lois, vos règles sont fossiles !
Car, avec l'air profond, vous êtes imbéciles !
Car vous enseignez tout, et vous ignorez tout !
Car vous êtes mauvais et méchants ! -- Mon sang bout
Rien qu'à songer au temps où, rêveuse bourrique,
Grand diable de seize ans, j'étais en rhétorique !
Que d'ennuis ! de fureurs ! de bêtises ! -- gredins ! --
Que de froids châtiments et que de chocs soudains !
«Dimanche en retenue et cinq cents vers d'Horace !»
Je regardais le monstre aux ongles noirs de crasse,
Et je balbutiais : «Monsieur... -- Pas de raisons !
Vingt fois l'ode à Panclus et l'épître aux Pisons !»
Or j'avais justement, ce jour là , -- douce idée
Qui me faisait rêver d'Armide et d'Haydée, --
Un rendez-vous avec la fille du portier.
Grand Dieu ! perdre un tel jour ! le perdre tout entier !
Je devais, en parlant d'amour, extase pure !
En l'enivrant avec le ciel et la nature,
La mener, si le temps n'était pas trop mauvais,
Manger de la galette aux buttes Saint-Gervais !
Rêve heureux ! je voyais, dans ma colère bleue,
Tout cet Éden, congé, les lilas, la banlieue,
Et j'entendais, parmi le thym et le muguet,
Les vagues violons de la mère Saguet !
O douleur ! furieux, je montais à ma chambre,
Fournaise au mois de juin, et glacière en décembre ;
Et, là , je m'écriais :
-- Horace ! ô bon garçon !
Qui vivais dans le calme et selon la raison,
Et qui t'allais poser, dans ta sagesse franche,
Sur tout, comme l'oiseau se pose sur la branche,
Sans peser, sans rester, ne demandant aux dieux
Que le temps de chanter ton chant libre et joyeux !
Tu marchais, écoutant le soir, sous les charmilles,
Les rires étouffés des folles jeunes filles,
Les doux chuchotements dans l'angle obscur du bois ;
Tu courtisais ta belle esclave quelquefois,
Myrtale aux blonds cheveux, qui s'irrite et se cabre
Comme la mer creusant les golfes de Calabre,
Ou bien tu t'accoudais à la table, buvant sec
Ton vin que tu mettais toi-même en un pot grec.
Pégase te soufflait des vers de sa narine ;
Tu songeais; tu faisais des odes à Barine,
A Mécène, à Virgile, à ton champ de Tibur,
A Chloë, qui passait le long de ton vieux mur,
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poem by Victor Hugo
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Sir Peter Harpdon's End
In an English Castle in Poictou. Sir Peter Harpdon, a Gascon knight in the English service, and John Curzon, his lieutenant.
John Curzon
Of those three prisoners, that before you came
We took down at St. John's hard by the mill,
Two are good masons; we have tools enough,
And you have skill to set them working.
Sir Peter
So-
What are their names?
John Curzon
Why, Jacques Aquadent,
And Peter Plombiere, but-
Sir Peter
What colour'd hair
Has Peter now? has Jacques got bow legs?
John Curzon
Why, sir, you jest: what matters Jacques' hair,
Or Peter's legs to us?
Sir Peter
O! John, John, John!
Throw all your mason's tools down the deep well,
Hang Peter up and Jacques; they're no good,
We shall not build, man.
John Curzon
going.
Shall I call the guard
To hang them, sir? and yet, sir, for the tools,
We'd better keep them still; sir, fare you well.
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poem by William Morris
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Hermes
FRAGMENT I.--PROLOGUE.
Dans nos vastes cités, par le sort partagés,
Sous deux injustes lois les hommes sont rangés:
Les uns, princes et grands, d'une avide opulence
Étalent sans pudeur la barbare insolence;
Les autres, sans pudeur, vils clients de ces grands,
Vont ramper sous les murs qui cachent leurs tyrans.
Admirer ces palais aux colonnes hautaines
Dont eux-mêmes ont payé les splendeurs inhumaines,
Qu'eux-mêmes ont arrachés aux entrailles des monts,
Et tout trempés encor des sueurs de leurs fronts.
Moi, je me plus toujours, client de la nature,
A voir son opulence et bienfaisante et pure,
Cherchant loin de nos murs les temples, les palais
Où la Divinité me révèle ses traits,
Ces monts, vainqueurs sacrés des fureurs du tonnerre,
Ces chênes, ces sapins, premiers-nés de la terre.
Les pleurs des malheureux n'ont point teint ces lambris.
D'un feu religieux le saint poète épris
Cherche leur pur éther et plane sur leur cime.
Mer bruyante, la voix du poète sublime
Lutte contre les vents; et tes flots agités
Sont moins forts, moins puissants que ses vers indomptés.
A l'aspect du volcan, aux astres élancée,
Luit, vole avec l'Etna, la bouillante pensée.
Heureux qui sait aimer ce trouble auguste et grand!
Seul, il rêve en silence à la voix du torrent
Qui le long des rochers se précipite et tonne;
Son esprit en torrent et s'élance et bouillonne.
Là , je vais dans mon sein méditant à loisir
Des chants à faire entendre aux siècles à venir;
Là , dans la nuit des coeurs qu'osa sonder Homère,
Cet aveugle divin et me guide et m'éclaire.
Souvent mon vol, armé des ailes de Buffon,
Franchit avec Lucrèce, au flambeau de Newton,
La ceinture d'azur sur le globe étendue.
Je vois l'être et la vie et leur source inconnue,
Dans les fleuves d'éther tous les mondes roulants.
Je poursuis la comète aux crins étincelants,
Les astres et leurs poids, leurs formes, leurs distances;
Je voyage avec eux dans leurs cercles immenses.
Comme eux, astre, soudain je m'entoure de feux;
Dans l'éternel concert je me place avec eux:
En moi leurs doubles lois agissent et respirent:
Je sens tendre vers eux mon globe qu'ils attirent;
Sur moi qui les attire ils pèsent à leur tour.
Les éléments divers, leur haine, leur amour,
Les causes, l'infini s'ouvre à mon oeil avide.
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poem by Andre Marie de Chenier
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La Liberte
UN CHEVRIER, UN BERGER
LE CHEVRIER
Berger, quel es-tu donc? qui t'agite? et quels dieux
De noirs cheveux épars enveloppent tes yeux?
LE BERGER
Blond pasteur de chevreaux, oui, tu veux me l'apprendre:
Oui, ton front est plus beau, ton regard est plus tendre.
LE CHEVRIER
Quoi! tu sors de ces monts où tu n'as vu que toi,
Et qu'on n'approche point sans peine et sans effroi?
LE BERGER
Tu te plais mieux sans doute au bois, Ã la prairie;
Tu le peux. Assieds-toi parmi l'herbe fleurie:
Moi, sous un antre aride, en cet affreux séjour,
Je me plais sur le roc à voir passer le jour.
LE CHEVRIER
Mais Cérès a maudit cette terre âpre et dure;
Un noir torrent pierreux y roule une onde impure;
Tous ces rocs, calcinés sous un soleil rongeur,
Brûlent et font hâter les pas du voyageur.
Point de fleurs, point de fruits, nul ombrage fertile
N'y donne au rossignol un balsamique asile.
Quelque olivier au loin, maigre fécondité,
Y rampe et fait mieux voir leur triste nudité.
Comment as-tu donc su d'herbes accoutumées
Nourrir dans ce désert tes brebis affamées?
LE BERGER
Que m'importe! est-ce à moi qu'appartient ce troupeau?
Je suis esclave.
LE CHEVRIER
Au moins un rustique pipeau
A-t-il chassé l'ennui de ton rocher sauvage?
Tiens, veux-tu cette flûte? Elle fut mon ouvrage.
Prends: sur ce buis, fertile en agréables sons,
Tu pourras des oiseaux imiter les chansons.
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poem by Andre Marie de Chenier
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Claire
Quoi donc ! la vôtre aussi ! la vôtre suit la mienne !
O mère au coeur profond, mère, vous avez beau
Laisser la porte ouverte afin qu'elle revienne,
Cette pierre là -bas dans l'herbe est un tombeau !
La mienne disparut dans les flots qui se mêlent ;
Alors, ce fut ton tour, Claire, et tu t'envolas.
Est-ce donc que là -haut dans l'ombre elles s'appellent,
Qu'elles s'en vont ainsi l'une après l'autre, hélas ?
Enfant qui rayonnais, qui chassais la tristesse,
Que ta mère jadis berçait de sa chanson,
Qui d'abord la charmas avec ta petitesse
Et plus tard lui remplis de clarté l'horizon,
Voilà donc que tu dors sous cette pierre grise !
Voilà que tu n'es plus, ayant à peine été !
L'astre attire le lys, et te voilà reprise,
O vierge, par l'azur, cette virginité !
Te voilà remontée au firmament sublime,
Échappée aux grands cieux comme la grive aux bois,
Et, flamme, aile, hymne, odeur, replongée à l'abîme
Des rayons, des amours, des parfums et des voix !
Nous ne t'entendrons plus rire en notre nuit noire.
Nous voyons seulement, comme pour nous bénir,
Errer dans notre ciel et dans notre mémoire
Ta figure, nuage, et ton nom, souvenir !
Pressentais-tu déjà ton sombre épithalame ?
Marchant sur notre monde à pas silencieux,
De tous les idéals tu composais ton âme,
Comme si tu faisais un bouquet pour les cieux !
En te voyant si calme et toute lumineuse,
Les coeurs les plus saignants ne haïssaient plus rien.
Tu passais parmi nous comme Ruth la glaneuse ,
Et, comme Ruth l'épi, tu ramassais le bien.
La nature, ô front pur, versait sur toi sa grâce,
L'aurore sa candeur, et les champs leur bonté ;
Et nous retrouvions, nous sur qui la douleur passe,
Toute cette douceur dans toute ta beauté !
Chaste, elle paraissait ne pas être autre chose
Que la forme qui sort des cieux éblouissants ;
Et de tous les rosiers elle semblait la rose,
Et de tous les amours elle semblait l'encens.
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poem by Victor Hugo
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Freak On
You think I don't see you but I do,
Creeping around with your hot pants on,
And them patent leather shoes,
Please forgive me baby,
Cos I've been up here too long,
Come on everybody freak along so that Wheatus can hear ya,
Hey now baby your actin' kinda crazy,
What has come over you?
Hey now sugar your actin' like a hooker,
Gotta do what you gotta do,
To get your freak on shoowap,
Baby where have you been,
Come get your freak on shoowap,
I think its time we begin,
Come get your freak on shoowap,
Don't make me say it again,
Come get your freak on shoowap,
I heard you were asking for a ride,
You say "take me home in your brothers jeep,
To a place where we can hide",
Please forgive me baby,
But your coming on too strong,
Aww, come on baby its ok maybe Pete will get with ya,
Hey now baby your actin' kinda crazy,
What has come over you?
Hey now sugar your actin' like a hooker,
Gotta do what you gotta do,
To get your freak on shoowap,
Baby where have you been,
Come get your freak on shoowap,
I think its time we begin,
Come get your freak on shoowap,
Don't make me say it again,
Come get your freak on shoowap,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon ooh,
One more time, one more time, one more time,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon,
C'mon c'mon c'mon c'mon c'mon ooh,
Come on everybody freak it along so that Wheatus can hear ya,
Hey now baby your actin' kinda crazy,
What has come over you?
Hey now sugar your actin' like a hooker,
Gotta do what you gotta do,
[...] Read more
song performed by Wheatus
Added by Lucian Velea
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Chanson des oiseaux
Vie ! ô bonheur ! bois profonds,
Nous vivons.
L'essor sans fin nous réclame ;
Planons sur l'air et les eaux !
Les oiseaux
Sont de la poussière d'âme.
Accourez, planez ! volons
Aux vallons,
A l'antre, Ã l'ombre, Ã l'asile !
Perdons-nous dans cette mer
De l'éther
Où la nuée est une île !
Du fond des rocs et des joncs,
Des donjons,
Des monts que le jour embrase,
Volons, et, frémissants, fous,
Plongeons-nous
Dans l'inexprimable extase !
Oiseaux, volez aux clochers,
Aux rochers,
Au précipice, à la cime,
Aux glaciers, aux lacs, aux prés ;
Savourez
La liberté de l'abîme!
Vie ! azur ! rayons ! frissons !
Traversons
La vaste gaîté sereine,
Pendant que sur les vivants,
Dans les vents,
L'ombre des nuages traîne !
Avril ouvre à deux battants
Le printemps ;
L'été le suit, et déploie
Sur la terre un beau tapis
Fait d'épis,
D'herbe, de fleurs, et de joie.
Buvons, mangeons ; becquetons
Les festons
De la ronce et de la vigne ;
Le banquet dans la forêt
Est tout prêt ;
Chaque branche nous fait signe.
Les pivoines sont en feu ;
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poem by Victor Hugo
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A celle qui est voilée
Tu me parles du fond d'un rêve
Comme une âme parle aux vivants.
Comme l'écume de la grève,
Ta robe flotte dans les vents.
Je suis l'algue des flots sans nombre,
Le captif du destin vainqueur ;
Je suis celui que toute l'ombre
Couvre sans éteindre son coeur.
Mon esprit ressemble à cette île,
Et mon sort à cet océan ;
Et je suis l'habitant tranquille
De la foudre et de l'ouragan.
Je suis le proscrit qui se voile,
Qui songe, et chante, loin du bruit,
Avec la chouette et l'étoile,
La sombre chanson de la nuit.
Toi, n'es-tu pas, comme moi-même,
Flambeau dans ce monde âpre et vil,
Ame, c'est-à -dire problème,
Et femme, c'est-Ã -dire exil ?
Sors du nuage, ombre charmante.
O fantôme, laisse-toi voir !
Sois un phare dans ma tourmente,
Sois un regard dans mon ciel noir !
Cherche-moi parmi les mouettes !
Dresse un rayon sur mon récif,
Et, dans mes profondeurs muettes,
La blancheur de l'ange pensif !
Sois l'aile qui passe et se mêle
Aux grandes vagues en courroux.
Oh, viens ! tu dois être bien belle,
Car ton chant lointain est bien doux ;
Car la nuit engendre l'aurore ;
C'est peut-être une loi des cieux
Que mon noir destin fasse éclore
Ton sourire mystérieux !
Dans ce ténébreux monde où j'erre,
Nous devons nous apercevoir,
Toi, toute faite de lumière,
Moi, tout composé de devoir !
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poem by Victor Hugo
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Le paradis
Des buissons lumineux fusaient comme des gerbes ;
Mille insectes, tels des prismes, vibraient dans l'air ;
Le vent jouait avec l'ombre des lilas clairs,
Sur le tissu des eaux et les nappes de l'herbe.
Un lion se couchait sous des branches en fleurs ;
Le daim flexible errait là -bas, près des panthères ;
Et les paons déployaient des faisceaux de lueurs
Parmi les phlox en feu et les lys de lumière.
Dieu seul régnait sur terre et seul régnait aux cieux.
Adam vivait captif en des chaînes divines ;
Eve écoutait le chant menu des sources fines,
Le sourire du monde habitait ses beaux yeux ;
Un archange tranquille et pur veillait sur elle
Et, chaque soir, quand se dardaient, là -haut, les ors,
Pour que la nuit fût douce au repos de son corps,
L'archange endormait Eve au creux de sa grande aile.
Avec de la rosée au vallon de ses seins,
Eve se réveillait, candidement, dans l'aube ;
Et l'archange séchait aux clartés de sa robe
Les longs cheveux dont Eve avait empli sa main.
L'ombre se déliait de l'étreinte des roses
Qui sommeillaient encore et s'inclinaient là -bas ;
Et le couple montait vers les apothéoses
Que le jardin sacré dressait devant ses pas.
Comme hier, comme toujours, les bêtes familières
Avec le frais soleil dormaient sur les gazons ;
Les insectes brillaient à la pointe des pierres
Et les paons lumineux rouaient aux horizons ;
Les tigres clairs, auprès des fleurs simples et douces,
Sans les blesser jamais, posaient leurs mufles roux ;
Et les bonds des chevreuils, dans l'herbe et sur la mousse,
S'entremêlaient sous le regard des lions doux ;
Rien n'avait dérangé les splendeurs de la veille.
C'était le même rythme unique et glorieux,
Le même ordre lucide et la même merveille
Et la même présence immuable de Dieu.
II
Pourtant, après des ans et puis des ans, un jour,
Eve sentit son âme impatiente et lasse
D'être à jamais la fleur sans sève et sans amour
D'un torride bonheur, monotone et tenace ;
Aux cieux planait encor l'orageuse menace
Quand le désir lui vint d'en éprouver l'éclair.
Un large et doux frisson glissa dès lors sur elle
Et, pour le ressentir jusqu'au fond de sa chair,
Eve, contre son coeur, serrait ses deux mains frêles.
L'archange, avec angoisse, interrogeait, la nuit,
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poem by Emile Verhaeren
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Vendémiaire
Hommes de l'avenir souvenez-vous de moi
Je vivais à l'époque où finissaient les rois
Tour à tour ils mouraient silencieux et tristes
Et trois fois courageux devenaient trismégistes
Que Paris était beau à la fin de septembre
Chaque nuit devenait une vigne où les pampres
Répandaient leur clarté sur la ville et là -haut
Astres mûrs becquetés par les ivres oiseaux
De ma gloire attendaient la vendange de l'aube
Un soir passant le long des quais déserts et sombres
En rentrant à Auteuil j'entendis une voix
Qui chantait gravement se taisant quelquefois
Pour que parvînt aussi sur les bords de la Seine
La plainte d'autres voix limpides et lointaines
Et j'écoutai longtemps tous ces chants et ces cris
Qu'éveillait dans la nuit la chanson de Paris
J'ai soif villes de France et d'Europe et du monde
Venez toutes couler dans ma gorge profonde
Je vis alors que déjà ivre dans la vigne
Paris Vendangeait le raisin le plus doux de la terre
Ces grains miraculeux qui aux treilles chantèrent
Et Rennes répondit avec Quimper et Vannes
Nous voici ô Paris Nos maisons nos habitants
Ces grappes de nos sens qu'enfanta le soleil
Se sacrifient pour te désaltérer trop avide merveille
Nous t'apportons tous les cerveaux les cimetières les murailles
Ces berceaux pleins de cris que tu n'entendras pas
Et d'amont en aval nos pensées ô rivières
Les oreilles des écoles et nos mains rapprochées
Aux doigts allongés nos mains les clochers
Et nous t'apportons aussi cette souple raison
Que le mystère clôt comme une porte la maison
Ce mystère courtois de la galanterie
Ce mystère fatal fatal d'une autre vie
Double raison qui est au-delà de la beauté
Et que la Grèce n'a pas connue ni l'Orient
Double raison de la Bretagne où lame à lame
L'océan châtre peu à peu l'ancien continent
Et les villes du Nord répondirent gaiement
Ô Paris nous voici boissons vivantes
Les viriles cités où dégoisent et chantent
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poem by Guillaume Apollinaire
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Au Chevalier De Pange
Quand la feuille en festons a couronné les bois,
L'amoureux rossignol n'étouffe point sa voix.
Il serait criminel aux yeux de la nature
Si, de ses dons heureux négligeant la culture,
Sur son triste rameau, muet dans ses amours,
Il laissait sans chanter expirer les beaux jours.
Et toi, rebelle aux dons d'une si tendre mère,
Dégoûté de poursuivre une muse étrangère
Dont tu choisis la cour trop bruyante pour toi,
Tu t'es fait du silence une coupable loi!
Tu naquis rossignol. Pourquoi, loin du bocage
Où des jeunes rosiers le balsamique ombrage
Eût redit tes doux sons sans murmure écoutés,
T'en allais-tu chercher la muse des cités,
Cette muse, d'éclat, de pourpre environnée,
Qui, le glaive à la main, du diadème ornée,
Vient au peuple assemblé, d'une dolente voix,
Pleurer les grands malheurs, les empires, les rois?
Que n'étais-tu fidèle à ces muses tranquilles
Qui cherchent la fraîcheur des rustiques asiles,
Le front ceint de lilas et de jasmins nouveaux,
Et vont sur leurs attraits consulter les ruisseaux?
Viens dire à leurs concerts la beauté qui te brûle.
Amoureux, avec l'âme et la voix de Tibulle
Fuirais-tu les hameaux, ce séjour enchanté
Qui rend plus séduisant l'éclat de la beauté?
L'amour aime les champs, et les champs l'ont vu naître.
La fille d'un pasteur, une vierge champêtre,
Dans le fond d'une rose, un matin du printemps,
Le trouva nouveau-né....
Le sommeil entr'ouvrait ses lèvres colorées.
Elle saisit le bout de ses ailes dorées,
L'ôta de son berceau d'une timide main,
Tout trempé de rosée, et le mit dans son sein.
Tout, mais surtout les champs sont restés son empire.
Là tout aime, tout plaît, tout jouit, tout soupire;
LÃ de plus beaux soleils dorent l'azur des cieux;
Là les prés, les gazons, les bois harmonieux,
De mobiles ruisseaux la colline animée,
L'âme de mille fleurs dans les zéphyrs semée;
LÃ parmi les oiseaux l'amour vient se poser;
LÃ sous les antres frais habite le baiser.
Les muses et l'amour ont les mêmes retraites.
L'astre qui fait aimer est l'astre des poètes.
Bois, écho, frais zéphyrs, dieux champêtres et doux,
Le génie et les vers se plaisent parmi vous.
J'ai choisi parmi vous ma muse jeune et chère;
Et, bien qu'entre ses soeurs elle soit la dernière,
Elle plaît. Mes amis, vos yeux en sont témoins.
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poem by Andre Marie de Chenier
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A Villequier
Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres,
Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ;
Maintenant que je suis sous les branches des arbres,
Et que je puis songer à la beauté des cieux ;
Maintenant que du deuil qui m'a fait l'âme obscure
Je sors, pâle et vainqueur,
Et que je sens la paix de la grande nature
Qui m'entre dans le cœur ;
Maintenant que je puis, assis au bord des ondes,
Emu par ce superbe et tranquille horizon,
Examiner en moi les vérités profondes
Et regarder les fleurs qui sont dans le gazon ;
Maintenant, ô mon Dieu ! que j'ai ce calme sombre
De pouvoir désormais
Voir de mes yeux la pierre où je sais que dans l'ombre
Elle dort pour jamais ;
Maintenant qu'attendri par ces divins spectacles,
Plaines, forêts, rochers, vallons, fleuve argenté,
Voyant ma petitesse et voyant vos miracles,
Je reprends ma raison devant l'immensité ;
Je viens à vous, Seigneur, père auquel il faut croire ;
Je vous porte, apaisé,
Les morceaux de ce cœur tout plein de votre gloire
Que vous avez brisé ;
Je viens à vous, Seigneur ! confessant que vous êtes
Bon, clément, indulgent et doux, ô Dieu vivant !
Je conviens que vous seul savez ce que vous faites,
Et que l'homme n'est rien qu'un jonc qui tremble au vent ;
Je dis que le tombeau qui sur les morts se ferme
Ouvre le firmament ;
Et que ce qu'ici-bas nous prenons pour le terme
Est le commencement ;
Je conviens à genoux que vous seul, père auguste,
Possédez l'infini, le réel, l'absolu ;
Je conviens qu'il est bon, je conviens qu'il est juste
Que mon cœur ait saigné, puisque Dieu l'a voulu !
Je ne résiste plus à tout ce qui m'arrive
Par votre volonté.
L'âme de deuils en deuils, l'homme de rive en rive,
Roule à l'éternité.
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poem by Victor Hugo
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